Le séminaire de l’année 2022-2023 prolongera, pour une troisième année, l’enquête sur un mot qui renvoie à la fois à une réalité, à une métaphore, à une revendication, et à une histoire des savoirs : Terre. Il s’agit, plus précisément, d’interroger de façon critique une figure assez largement répandue dans les discours contemporains : celle du retour sur Terre.
On observe aujourd’hui une prolifération de propositions, et de préoccupations, visant à « faire revenir la Terre », pour ainsi dire, dans les horizons de la pensée et de l’action. Il ne s’agit plus cependant de partir « à la découverte de la Terre ». Mais, dans les domaines de l’écologie, de l’anthropologie, de la politique, de la philosophie, de l’esthétique, s’installe une réflexion sur la nécessité de prendre en compte la Terre comme socle, élément, ou forme, de la vie humaine. « Revenir sur Terre », donc, serait une condition pour l’élaboration de nouvelles formes de vie, individuelles et collectives, pour lesquelles les dimensions du « terrestre » sont considérées comme fondamentales.
L’investigation ouverte au sein du séminaire est double. Il s’agit, d’une part, de poser la question : sur ou vers quelle Terre fait-on retour ? Il semble nécessaire d’analyser les usages, présents et passés, dans les sciences, les arts, la philosophie, de cette référence à la Terre. Et pour cela d’ouvrir une enquête historique et philosophique. Mais il s’agit, d’autre part, d’interroger les figures métaphoriques de ce retour (l’abordage, l’attachement, l’enracinement, ou l’atterrissage, par exemple), et surtout d’essayer d’éclaircir ce que portent ces figures de retour, ce qu’elles veulent donner à penser, et à vouloir.
Le fil conducteur de cette enquête, ou plutôt son espace d’observation, sera constitué principalement par la géographie. Faire retour sur Terre, n’est-ce pas, en un certain sens, revenir à la géographie ? Précisément parce que la géographie est à la fois description de la Terre et écriture sur la Terre ? Mais, encore une fois, laquelle ? Et comment la géographie, comme savoir, comme imaginaire, et comme pratique de l’espace, s’est-elle confrontée, et peut-elle encore aujourd’hui s’articuler aux propositions et interrogations artistiques, philosophiques, politiques sur ce qu’il en est du lien, de l’attachement, ou de l’appartenance, au « terrestre » ?
Le séminaire de l’année 2020-2021 a envisagé quelques manières de penser et de voir la Terre anciennes et contemporaines : la Terre comme planète, comme espace universel, comme globe, comme sol. Le séminaire 2021-2022 a exploré les espaces souterrains, les « Terres souterraines », du point de vue des pratiques, des représentations, des théories, des imaginaires, etc.
On proposera cette année de prolonger l’analyse, mais dans une orientation pour ainsi dire symétrique et « ascendante » : ce sont les espaces non terrestres, extra-terrestres, les « Terres célestes », qui seront au centre de l’enquête. On envisagera, par exemple, l’impact des techniques aéronautiques sur les imaginaires de l’habiter, ou encore les projets de vols inter-planétaires et de création de demeures extra-terrestres, mais aussi les enjeux géopolitiques contemporains relatifs à l'installation dans l'espace inter-planétaire et à son exploitation, ainsi que les imaginaires et les fictions qui ont pris en charge cette dimension ascendante de l'espace. Il s’agit, de façon générale, d’interroger, dans ce troisième volet de l’enquête (après les surfaces, puis les profondeurs), les formes possibles de vies non terrestres, plus précisément: dégagées des contraintes et limitations propres à l’existence terrienne ordinaire.
Le séminaire sera divisé en trois parties: